Comment notre cerveau fonctionne-t-il face à une peur extrême ?
Une femme sur 7 victimes de viols déclare ne pas s’être défendue lors de son agression[1].
Beaucoup d’entre elles se trouvent aussi dans l’incapacité de crier et de s’enfuir. Ce manque d’actions pour lesquelles elles peuvent être jugées, blâmées, leur est parfois reproché par tous ceux qui ignorent la neurobiologie du traumatisme. Il faut, en effet, comprendre la manière dont notre cerveau fonctionne face à des expériences traumatisantes, pour accéder à ces comportements qui peuvent apparaître comme contre-intuitifs (Craig, 2018).
Une meilleure information sur ces réponses cérébrales peut contribuer à modifier l’interprétation que se font les victimes après-coup de leur comportement, de la voie empruntée par leur corps, voie n’ayant à aucun moment été choisie.
Lorsqu’une menace à notre survie physique est proche, le cerveau humain, à moins d’avoir été entraîné de façon spécifique, passera sous une dominance sous-corticale c’est-à-dire inconsciente et adoptera les réponses de la fuite, de la lutte ou de survies extrêmes.
1- 1er réflexe du cerveau : figer
Cette réaction intervient en moins d’une seconde. Elle est automatique et totalement inconsciente. La victime se fige dès l’instant où l’amygdale détecte une menace. L’état de vigilance est activé. Les hormones de stress envahissent le cerveau et limitent la capacité de penser, de planifier et de raisonner.
Quiconque faisant face à une agression qu'elle soit sexuelle ou pas, ne peut évaluer de manière rationnelle les événements et décider en conscience ce qu’il doit faire.
2- 2nd réflexe du cerveau : fuir ou combattre
Tout juste après cette 1ère réaction, la personne doit choisir la façon dont elle réagit parmi toutes les réactions dont elle dispose, réactions qui sont basées sur l’habitude.
La fuite ou le combat sont malheureusement les réactions réflexes que la plupart des victimes d’agression sexuelle sont les moins susceptibles d’avoir car elles ne sont, en général, pas préparées à se défendre efficacement. Elles n’ont pas été entraînées à le faire et sans cette formation, sans cet entraînement, le cerveau soumis à un grand stress adoptera par défaut un comportement habituel.
Un autre obstacle à la résistance ou à la défense stratégique et efficace : les agresseurs sont souvent des hommes que les femmes connaissent (Conroy et Cotter, 2017), des personnes auxquelles elles sont censées faire confiance.
Lorsque la fuite ou le combat sont impossibles, le cerveau inondé de substances neurochimiques met en place une troisième réponse afin de réduire l’intensité de la peur et de la douleur.
3- 3ème réflexe : les réponses de survie extrêmes
Les réponses de survie extrêmes prennent la relève (Hopper, 2017) : dissociation, immobilité tonique et hypotonique.
La dissociation permet à la personne de se déconnecter de sa propre expérience afin d’échapper à la douleur émotionnelle ou à l’horreur de la situation.
La personne ne ressent plus son corps.
L’immobilité tonique se caractérise par une paralysie temporaire ou une immobilité musculaire totale ou partielle. La personne peut se trouver paralysée à un moment et capable de bouger juste après (Kozlowska et al., 2015) mais elle est pleinement consciente de ce qui lui arrive.
Cette réaction amène souvent les victimes à exprimer leur détresse de ne pas avoir pu bouger ou appeler au secours.
Et avec l’immobilité hypotonique, les muscles se relâchent et se détendent, la personne pouvant décrire l’expérience comme ayant eu l’impression d’être molle et sans force. Cette posture de relaxation est adoptée dans l’espoir que le prédateur ou la menace potentielle perde tout intérêt ou s’en aille.
Il est essentiel que les victimes d’agressions sexuelles et de viols comprennent que leur capacité à se battre ou à s’enfuir était hors de leur contrôle conscient, leur cerveau s’étant placé en pilotage automatique, décidant seul, de la meilleure stratégie à adopter pour survivre.
Et comme le font les pompiers, les gendarmes, il faut entraîner son cerveau et son corps face à ces situations extrêmes à avoir la meilleure réponse possible.
Fuir, se défendre, cela s’apprend !
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Lou Lucie Cabalery
Docteur en sciences sociales et humaines, hypnothérapeute formée en psychopathologie
[1] Möller, A, Söndergaard, HP, Helström, L. "Tonic immobility during sexual assault – a common reaction predicting post-traumatic stress disorder and severe depression". Acta Obstet Gynecol Scand 2017; 96: 932– 938.
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